Depuis les événements du 26 juillet 2023 qui ont renversé le régime de la 7ème République, beaucoup de voix se sont légitimement élevées pour se prononcer sur la marche de la transition. C’est surtout l’élan patriotique et de souveraineté qui a pris le dessus, libérant la parole au niveau des leaders d’opinions qui appelaient à un sursaut national pour la sauvegarde de la patrie. Leaders religieux, chefs coutumiers, acteurs de la société civile, organisations féminines, organisations des jeunes et acteurs politiques, chacun dans sa sphère de compétence, a apporté son soutien et exprimé ses opinions pour la bonne marche de la transition.
Dans cette dynamique, les leaders religieux et les Chefs traditionnels ont beaucoup œuvré, à travers prières et messages de paix pour apaiser les tensions et interpeller la CEDEAO sur les lourdes sanctions qui ont été prises à l’endroit du Niger et de son peuple. Gardiens des valeurs religieuses et traditionnels, respectés et écoutés, leurs messages étaient écoutés avec grande attention par les populations. Impartiaux et neutres quelle que soient les circonstances, ils sont les personnalités privilégiées pour être les meilleures arbitres pendant les périodes de crise.
Depuis le début de la transition, le Président du CNSP, Chef de l’État a reçu les organisations religieuses et l’Association des Chefs traditionnels en raison de leur influence et de la place qui est la leur dans notre société afin qu’ils œuvrent pour la paix, la cohésion sociale, l’unité nationale et la levée des sanctions de la CEDEAO. Tous s’y sont engagés dans un élan patriotique jamais égalé.
Cependant plus on avance dans la transition, plus on constate des glissements de certains de ces acteurs dans des questions hautement politiques.
Beaucoup de nos concitoyens ont déploré les propos du Président de l’Association Islamique du Niger (AIN), Cheikh Djibrilla Soumaïla Kanranta, qui dans une vidéo devenue virale, se mêler d’un aspect hautement politique de la transition relatif à la durée de la transition, qui pour lui pouvait durer autant de temps qu’il restera un seul terroriste dans le pays.
Des propos jugés malheureux par l’opinion publique nationale qui estime que sa stature et son rôle de gardien des valeurs religieuses lui imposaient de la mesure et une certaine neutralité. Son discours a été perçu comme un glissement qui rappelle une autre époque où des acteurs sociaux et politiques ont poussé les présidents Ibrahim Baré Mainassara et Tandja Mamadou à des dérapages.
Le second acteur soumis à ce devoir de réserve et qui se donne beaucoup de liberté est le Chef de Canton de Djounjou, l’Honorable Mahamadou Bachir Harouna Hambali.
Ce dernier avait pris, au lendemain du coup d’Etat du 26 juillet 2023, de bonnes initiatives de plaidoyer pour amener les anciens présidents de la République du Niger et anciens Chefs d’État à s’impliquer dans le règlement de la crise nigérienne.
Il a, à cet effet, rencontré, entre autres, l’ancien Président Mahamane Ousmane, l’ancien Chef d’Etat Salou Djibo. Mais après plus rien avant sa sortie médiatique sur la RTN où là aussi de nombreux téléspectateurs ont perçu un dérapage de l’autorité traditionnelle sur le terrain politique. Beaucoup ont compris que, pour lui, le CNSP ne doit pas céder à une transition courte. Cela aussi a été mal vu au sein de l’opinion publique nationale qui considère encore que les dépositaires de la tradition ne doivent pas tenir ce genre de discours qui les jettent dans la mare politique avec les risques de perdre toute crédibilité au prestigieux titre que l’on incarne.
Adoum Boulkassoum