Voilà plus de quinze mois, que les activités des partis politiques sont suspendues, suite aux évènements du 23 juillet 2023, qui ont consacré l’avènement du CNSP au pouvoir. Au moment où les autorités du CNSP prenaient cette mesure, personne n’a trouvé à redire parce que c’est une pratique bien connue du public, qu’après chaque coup d’état, les activités des partis politiques sont immédiatement suspendues, en même temps que certaines institutions de la République voire même la Constitution qui sont tout simplement dissoutes assez souvent.
Cette disposition procède aussi des mesures conservatoires pour éviter que les partis politiques aient des velléités bellicistes ou qu’ils procèdent à des actes de sabotage. Toutefois la mesure de suspension se limite dans la plupart des cas à une période bien précise et courte c’est-à-dire le temps nécessaire pour les nouvelles autorités de s’installer et prendre véritablement les rênes du pays dans leurs mains. C’est pourquoi aujourd’hui beaucoup de nigériens s’interrogent sur les vraies raisons de cette suspension des activités des partis politiques qui parait longue et son bien-fondé, qui plus on ne perçoit aucun signe annonçant leur retour sur la scène publique.
Même dans les discussions préparatoires du forum inclusif, prévu pour se tenir en principe dans les prochains jours, les partis politiques n’ont pas été associés jusque-là et plus grave, les nouvelles autorités n’ont pas encore pipé le moindre mot sur le sort qui attend les partis, tout au long de la présente transition. Pourtant ils ont observé scrupuleusement la décision du CNSP en s’abstenant d’organiser toute activité qui soit préjudiciable à la bonne marche de la transition et aux nouvelles orientations dans la gouvernance du pays déclinées par le CNSP. Mieux leurs militants ont pris part à la grande mobilisation qui a eu lieu dans les différentes régions, en guise de soutien au CNSP.
Par ailleurs, à la différence des précédents coups d’état, celui du 26 juillet 2023 n’a aucun lien avec une quelconque crise politique ou un dysfonctionnement des institutions de la République. Bien au contraire, la classe politique s’entendait parfaitement et les rencontres au niveau du Conseil National de Dialogue Politique ont repris régulièrement et en parfaite symbiose jusqu’au soir du 25 juillet 2023. Du reste, pour la première fois un chef de file de l’opposition a été nommé avec tous les avantages qui lui sont accordés par la loi notamment, un grand bâtiment sis au plateau lui servant de bureau, un cabinet, un personnel et une place dans le protocole officiel de l’Etat en tant chef d’institution.
Ainsi, il est temps pour le CNSP de se pencher sur le cas des partis politiques mais surtout de les compter parmi les acteurs clés pouvant apporter leur précieuse contribution dans les réflexions en cours en vue de la refondation à laquelle aspire le pays, au regard de leur expérience et de leur grande influence sur les populations.
En outre, il faut admettre que toutes les réformes et les nouvelles orientations qui seront issues des prochaines consultations nationales, vont échoir un jour dans les mains des partis politiques pour leur mise en œuvre étant entendu que le retour à la démocratie est irréversible dans ce monde contemporain.
Il est évident que dans le cadre de la gestion de la transition actuelle, le CNSP est libre de déterminer la durée qu’il juge suffisante pour asseoir les bases d’un Niger nouveau avant tout retour à l’ordre constitutionnel normal, pour passer le témoin aux partis politiques, eu égards aux multiples défis sur le plan sécuritaire et sur la question de la gouvernance du pays de façon globale.
Certes, dans ses premières adresses à la nation, le Général Abdourahamane Tiani a parlé d’une période maximale de trois ans, mais tout dépendra du forum national inclusif qui déterminera librement la durée de la transition en tenant compte du travail que souhaite abattre le CNSP pour le bien de tous et de la situation de notre pays. A priori, la majorité des nigériens estiment que le CNSP doit prendre le temps qu’il faut pour remettre les pendules à l’heure et placer indubitablement le pays sur les rails pour le mettre à l’abri d’un retour fatal à la case de départ.
Néanmoins le CNSP doit éviter de prêter l’oreille à une soi-disant société civile qui veut diaboliser à dessein les partis et les acteurs politiques et prendre en otage la transition en cours. En réalité cette pègre est constituée en majorité des acteurs qui s’agitent sous le couvert d’un parti politique en adoptant opportunément un discours débridé sur la souveraineté. Il y a également dans ce tohu-bohu un gros lot de gens frustrés, désœuvrés et incultes qui cherchent tout simplement à s’offrir quelques rentes, en échange de leur supposé soutien au CNSP, alors qu’il s’agit du devenir du pays.
C’est pourquoi le Général Tiani doit rester vigilant et ferme pour conduire efficacement cette transition conformément à ses engagements, avec le soutien et la participation de tous les nigériens. La fixation que font certains acteurs haineux et zélés sur les gens dits de l’ancien régime doit cesser, pour laisser la justice et la COLDEFF faire leur travail librement.
En parlant de partis politiques, il serait souhaitable à la libération de l’espace politique, de procéder à un toilettage pour assainir et recadrer les partis politiques folkloriques qui ne remplissent pas les conditions prévues par la loi. En lieu et place d’une pléthore dont la majorité n’ont rien de partis politiques que de nom, pourquoi ne pas se contenter d’une dizaine de formations politiques viables et représentatives, aptes à compétir valablement à l’occasion des élections. Un nombre réduit de partis politiques faciliterait beaucoup l’organisation des élections avec des coûts moindres.
Tout récemment au Gabon les nouvelles autorités ont décidé de ramener le nombre des partis politiques à cinq et ont exigé un niveau de représentativité avant la création de tout nouveau parti politique. Au Tchad le ministre de l’Intérieur vient de dissoudre plus de soixante-dix partis politiques, tout comme en Mauritanie ou en Guinée Conakry où les autorités ont également retiré l’arrêté d’exercice à plus de soixante-quinze partis politiques. C’est le cas aussi du Benin qui a dissout un lot de partis factices. Il y’a pleins d’exemples où les autorités ont mis de l’ordre dans le microcosme politique.
Le nombre des partis politiques au Niger oscillent autour de deux-cents à la veille du coup d’état avec à peine une vingtaine qui sont représentés à l’Assemblée Nationale D’où la nécessité d’opérer une cure pour chasser ceux qui grossissent et infestent inutilement le milieu.
Adoum Boulkassoum