Excellence Monsieur Faure Essozimna Gnassingbé, Président de la République Togolaise ;
- Excellences Messieurs les Président des Pays membres de l’UEMOA et de la CEDEAO ;
- Messieurs les Présidents des Institutions Régionales ;
- Monsieur Ousmane DIAGANA, Vice-Président de la Banque Mondiale pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre ;
- Mesdames et Messieurs, distingués invités, à vos titres, grades et qualités.
C’est avec un réel plaisir que je participe aujourd’hui, à vos côtés, à cet évènement de Haut Niveau sur la souveraineté alimentaire et nutritionnelle de notre région qui a pour thème « Pour un renforcement de la filière et pour une amélioration de l’utilisation des engrais en tant qu’élément clef de la relance de la production agricole et de la lutte contre l’insécurité alimentaire en Afrique de l’Ouest ».
Avant tout propos, je voudrais remercier du fond du cœur, mon frère et ami, le Président Faure Essozimna Gnassingbé, pour m’avoir invité à cette rencontre en ma qualité du Président du Comité de Haut Niveau pour la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle. Je voudrais également le remercier pour l’accueil empreint de chaleur, caractéristique de l’hospitalité togolaise, réservé à moi-même et à ma délégation.
Excellences, Mesdames et Messieurs ;
Je me fais tout d’abord le devoir de rappeler l’importance et la place du Comité de Haut Niveau, mis en place en décembre 2011 par la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Union.
Cette initiative a été prise après une campagne agricole pluviale désastreuse, caractérisée par des séquences sèches et une forte pression des ennemis de cultures qui ont contribué à une baisse drastique de la production agro-sylvopastorale, ayant conduit à une insuffisance de l’alimentation aussi bien pour les humains que pour le cheptel.
A cet effet, le Comité de Haut Niveau a été mandaté pour réfléchir et apporter des solutions appropriées, permettant d’éradiquer durablement la faim, la malnutrition et la pauvreté dans l’espace communautaire.
En l’espace d’une décennie, le Comité s’est érigé en un lieu de promotion durable et de dialogue de Haut Niveau en matière de gouvernance de la situation alimentaire et nutritionnelle dans notre sous-région.
Aujourd’hui, il est l’un des comités les plus opérationnels au sein de notre espace Communautaire. Il a ainsi tenu sa 11ème Réunion en Juin 2022, à Niamey.
A chacune de ses rencontres, qui se tiennent après la campagne agricole pluviale, le Comité passe en revue la situation agrosylvopastorale et nutritionnelle et formule des recommandations à même d’améliorer la sécurité alimentaire et nutritionnelle dans les pays de la région ouest africaine.
Mesdames et Messieurs,
La production céréalière en Afrique de l’Ouest et le sahel pour la campagne agropastorale 2021, évaluée à 73 millions de tonnes, est en hausse de 2,7% par rapport à la moyenne des cinq dernières campagnes, mais en baisse de 2,2% comparée à celle de l’année 2020. Elle est marquée par de fortes disparités entre les pays.
Ainsi, la production des pays sahéliens a affiché une baisse de 11%. La production fourragère a été plus durement affectée dans certains pays du Sahel. C’est le cas du Niger qui avait enregistré un déficit de près de 54% des besoins fourragers de son cheptel.
La population totale affectée par le déficit céréalier de cette campagne a été évaluée à plus de 32 millions de personnes dans l’Union.
La campagne agricole 2022-2023, quant à elle, a enregistré une production céréalière de 77,6 millions de tonnes, soit une hausse de 8% par rapport à l’année dernière et de 6% comparée à la moyenne des cinq dernières années au Sahel et en Afrique de l’Ouest. Les pays du Sahel ont connu un rebond de leur production, après la forte baisse observée en 2021.
Malgré cette augmentation notable de la production agricole en 2022, les analyses du Cadre Harmonisé sur une population totale de 390 millions de personnes dans les 14 pays de la région du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest confirment une situation alimentaire encore alarmante avec près de 29,5 millions de personnes en phase « crise à pire » pour la période allant de mars à mai 2023. Si des réponses efficaces ne sont pas mises en œuvre, 41,9 millions de personnes pourraient être en insécurité alimentaire pendant la période de soudure en juin-août 2023.
Mesdames et Messieurs, distingués invités,
Le déficit chronique de la production agrosylvopastorale dans notre région tire fondamentalement sa raison d’être des spécificités du secteur agricole.
Ainsi, le développement de ce secteur est fortement entravé par la pauvreté structurelle des sols, caractérisée par leur carence en nutriments, elle-même liée en partie à un déficit d’apport en engrais.
Cette pauvreté des sols est exacerbée par la pression anthropique et les effets dévastateurs du changement climatique. Des facteurs conjoncturels tels que l’insécurité civile, l’apparition de la COVID 19 et la guerre russo-ukrainienne ont aussi conduit à la baisse significative de l’utilisation des engrais du fait du renchérissement de leurs coûts.
Face à la situation de sous-utilisation des engrais, la réponse du Gouvernement du Niger a été la mise en œuvre de la réforme des engrais initiée dans ce domaine, depuis 2018. Cette réforme a pour objectif principal d’accroitre les productivités agricoles à travers une meilleure disponibilité et accessibilité des engrais aux producteurs à temps pendant toutes les périodes de production.
Pour atteindre cet objectif, la réforme a permis de mettre en place un cadre opérationnel de la subvention aux engrais destinée aux producteurs ciblés à travers notamment l’Observatoire des Marchés des Engrais au Niger (OMEN), l’Association Nigérienne des Importateurs et Distributeurs d’Engrais (ANIDE) ainsi que l’amélioration du cadre juridique et réglementaire.
Ainsi, l’importation et la distribution des engrais ont été libéralisées avec un dispositif de contrôle de qualité et un système de subvention ciblée a été mis en place.
Ces résultats ont certes permis au secteur privé de s’impliquer pleinement dans l’approvisionnement du pays en engrais et à l’Etat d’instaurer le système de subvention ciblée, mais n’ont pas encore assuré la disponibilité adéquate et l‘accessibilité des engrais à des prix abordables dans le pays. Beaucoup reste encore à faire pour atteindre cet objectif.
Mesdames et Messieurs ;
La problématique des engrais a été largement analysée lors de la Session de 11 Juin 2022 à Niamey.
A l’issue des échanges, très fructueux, la session a formulé des recommandations pertinentes spécifiques à l’approvisionnement en engrais de la région.
Pour rappel, les Etats et l’Organisation Communautaire ont été appelés à :
- prendre des mesures pour sécuriser l’approvisionnement en engrais pour les cultures vivrières pour la campagne agricole 2023-2024, notamment ;
- faciliter l’accès au financement pour les importations d’engrais ;
- supprimer toute sorte de taxes sur les engrais là où elles existent ;
- renforcer la mise en œuvre de la règlementation régionale relative aux engrais, notamment en renforçant les dispositifs nationaux de contrôle de qualité des engrais ;
- mettre en place et/ou dynamiser les mécanismes de veille et d’alerte sur les effets des chocs (conflit en Ukraine, insécurité civile…) aggravant l’accessibilité aux denrées alimentaires, aux intrants agricoles et au bétail.
Mesdames et Messieurs ;
La Réforme du secteur des engrais du Niger et les recommandations du Comité de Haut Niveau sur la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle sont parfaitement en ligne avec les objectifs de cette Table Ronde qui est d’améliorer l’accès aux engrais pour les producteurs agricoles.
Cette amélioration sera obtenue à travers le renforcement des politiques sectorielles et du cadre politique et règlementaire, une meilleure efficacité et une utilisation plus durable des engrais et le renforcement institutionnel et des ressources humaines de la filière.
De surcroit, les recommandations du Comité de Haut Niveau et les mesures de la Réforme des Engrais au Niger, s’insèrent parfaitement dans les quatre (04) Axes et les douze (12) Actions prioritaires de la Feuille de Route sur les Engrais et la Santé des Sols en Afrique de l’Ouest et au Sahel, que la Table Ronde vient d’adopter.
Mesdames et Messieurs ;
Cet alignement, parfaitement intégral, des mesures préconisées par la 11ème session du Comité de Haut Niveau sur la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle avec celles retenues dans la Feuille de Route que vous venez d’adopter, indique que les Etats du Comité avaient bien perçu et posé la problématique des engrais à temps.
C’est pourquoi, le Comité de Haut Niveau, par ma voix, apporte son soutien total à la Déclaration de Lomé sur les Engrais et la Santé des Sols en Afrique de l’Ouest et au Sahel, qui engage les Etats de la région et leurs partenaires à agir avec célérité dans le secteur des engrais pour rendre la productivité agricole plus durable et résiliente.
Dans ce cadre, l’ensemble des pays membres du Comité de Haut Niveau sur la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle, très conscients de l’aspect crucial de la problématique d’approvisionnement en engrais, sont exhortés à intégrer dans leur architecture nationale et à mettre en œuvre les différentes mesures retenues dans la Feuille de Route.
Pour ma part, en ma qualité du Président du Comité de Haut Niveau, je ne ménagerai aucun effort pour sensibiliser mes pairs à adopter et à mettre en œuvre les actions retenues dans la feuille de route.
Dans le même cadre, je travaillerai avec la Commission de l’UEMOA, pour créer les conditions nécessaires à la réussite de la mise en œuvre de cette feuille de route.
Je vous remercie de votre aimable attention.